Les 7 étapes du changement créateur
- Étape 4: L'expression responsable -
Définition de l'expression responsable
Dans la conception de l’Approche Non Directive CréatriceMD (ANDCMD), l’expression responsable implique de s’exprimer à partir de soi, en parlant de soi. S’exprimer avec responsabilité implique aussi de discerner ce qui est à soi de ce qui est à l’autre.
Par opposition, lorsque nous blâmons, accusons ou excusons l’autre, nous sommes sur l’autre et non avec nous-mêmes. Dans ces cas de figure, nous ne nous exprimons pas de façon responsable.
Nous nous exprimons également de façon irresponsable lorsque nous argumentons défensivement pour tenter d’avoir raison sur la vie d’une autre personne. Dans cette circonstance, nous prenons du pouvoir sur la vie de l’autre et nous perdons l’accès à notre vécu et à nos besoins.
L'expression responsable présente des avantages importants
Elle permet de clarifier:
- les besoins de chacun
- les limites personnelles
- les forces de chaque personne
Dans bien des cas, elle a le mérite de faciliter les relations et de rapprocher les gens.
D’autre part, elle facilite la prise de décision lorsque l’éloignement est préférable, que ce soit de façon temporaire ou définitive.
- Par opposition à l'expression responsable -
Ce qui n'est pas exprimé ou Ce qui est exprimé de façon défensive entrave les relations.
Mise en situation
Pour illustrer les 7 étapes du processus de changement créateur, je vous ai invités à vous imaginer cette situation-ci : Vous allez rencontrer votre conjoint ou votre conjointe au restaurant après votre journée de travail. Vous êtes en retard. À votre arrivée, votre partenaire vous lance en criant : «T’es encore en retard, t’es jamais à l’heure!».
Il est possible -et humain- que vous réagissiez défensivement face à la réaction défensive de votre partenaire. En effet, votre partenaire est dans le blâme, l’accusation et la généralisation. Si vous portez en vous une zone vulnérable aux reproches, aux blâmes, aux accusations, aux généralisations ou au ton de voix (vos déclencheurs), il est possible que vous réagissiez défensivement. Si c’est le cas, c’est que vous n’arrivez pas à être sensible à vous-même et à la souffrance qui est éveillée en vous à ce moment-là.
Par contre, si vous avez développé la conscience et l’acceptation de vos déclencheurs et de vos mécanismes de défense, et si vous en prenez la responsabilité, vous serez plus en mesure de vous exprimer de façon responsable à votre partenaire.
Dans la prochaine section, je vous propose quelques exemples d’expression responsable d’un mécanisme de défense.
Exemples de possibilités d’expression responsable du mécanisme de défense
Lorsque vous remarquez que vous avez un certain comportement ou une certaine réaction défensive, vous pouvez l’exprimer à votre partenaire. Je vous offre des exemples d’expression pour les mécanismes de défense suivants:
- Le blâme en retour
- Le repli sur soi
- Être faussement gentil (personnage)
- L’activisme
-
Le blâme en retour: «Là, j’vois que je réagis fort, quand tu me dis que j’arrive toujours en retard! Je veux te blâmer en retour. J’vais aller prendre une marche pour me calmer et je te reviens».
- Le repli sur soi: «Là, je vois que je suis en train de me refermer sur moi-même. Je n’arrive pas à faire mieux pour l’instant, mais je te reparle dans quelques minutes.»
-
Être faussement gentil (personnage): «Je réalise que je suis en
train de m’excuser pour acheter la paix. Je ne sais pas ce qui se passe
en moi en ce moment, mais je vais travailler ça en thérapie et je t’en
reparle.»
-
L'activisme: «Je vois bien que je m'active et que je suis en train de ranger les chaises autour de la table. Je suis déclenché/e par la façon dont tu m'as acueilli/e aujourd'hui.»
Même si vous ne savez pas encore précisément quel est votre vécu, vous préservez le lien à votre partenaire. En effet, vous lui indiquez ce qui se passe pour vous: vous réalisez que vous êtes dans un mécanisme de défense. De plus, dans certains de ces exemples, vous indiquez votre intention d’en reparler plus tard.
Évitement ou Protection?
Même si vous vous éloignez ensuite pour tenter de remettre de l’ordre dans votre chaos intérieur, vous n’êtes pas dans la fuite ou l’évitement (mécanismes de défense). Vous tentez plutôt de vous protéger momentanément et de préserver la relation. Ceci constitue un mécanisme de protection car vous faites ce choix consciemment, comme il en sera question dans l’article 5.
Cependant, si vous tenez à la relation mais que vous continuez à éviter ou à fuir le sujet de la discorde sans travailler à cerner ce qui s’est passé pour vous, alors cela constitue un mécanisme de défense.
Quelques rappels:
Découvrir ce qui se cache sous un mécanisme de défense
Le processus d’évolution intérieure implique non seulement de connaître, d’accueillir et de se responsabiliser de nos mécanismes de défense pour pouvoir les exprimer si on le désire, mais aussi d’apprendre à connaître nos zones vulnérables et la souffrance qui leur est associée.
Connaître nos blessures et notre vécu intérieur, cela signifie apprivoiser, c’est-à-dire sentir et accueillir le vécu associé à ces blessures. Cela signifie être en contact avec ce vécu lorsqu’il émerge dans l’ici-maintenant de notre vie quand nous faisons face aux éléments qui nous déclenchent.
Pourquoi apprivoiser le vécu intérieur?
Cependant, nous avons parfois peur de sentir ce qui nous habite. De plus, nous ne voyons pas toujours l’intérêt d’entrer en contact avec nos souffrances intérieures puisque cela implique de sentir quelque chose de désagréable. Je suis d’ailleurs vraiment sensible à vous qui me lisez et qui n’avez pas envie de sentir certaines émotions comme la tristesse, la peur, la colère, la culpabilité ou la honte. Certaines personnes peuvent même avoir peur de sentir la joie ou l’amour. Sachez qu’il y a une récompense au bout du vécu désagréable : cela nous permet de découvrir quels sont les besoins psychiques fondamentaux qui demandent à être écoutés, entendus et accueillis.
Souvenez-vous:
La personne qui s'exprime à l'autre augmente ses chances d'être entendue lorsqu'elle le fait de façon responsable
Pour bien communiquer, une personne parle et l'autre écoute
Lorsque les 2 personnes parlent, il n'y a pas de communication!
Exemples d’expression responsable du vécu
Dans l’exemple que j’ai utilisé pour décrire les 7 étapes du changement créateur, vous êtes la personne qui reçoit le jugement, le blâme, la critique ou la généralisation de votre conjoint. Si vous arrivez à être en contact avec votre vécu de l’instant et à l’assumer pleinement comme étant le vôtre, cela vous donne des pistes pour exprimer ce que vous vivez à l’autre. Il est important de vous respecter dans votre capacité de dévoilement de l’instant.
N’oubliez pas: la communication responsable implique le respect de soi et de l’autre. Par conséquent, particulièrement face à des situations délicates, il est important de bien choisir son moment et son endroit pour s’exprimer.
Quand et où?
La personne qui désire s’exprimer à l’autre augmente ses chances d’être entendues lorsqu’elle choisit un endroit et un moment qui convient aux 2 personnes impliquées.
Parfois, il peut être nécessaire de prendre rendez-vous en spécifiant l’objectif de la rencontre. Dans d’autres occasions cependant, lorsque vous êtes suffisamment en contact avec votre vécu et que l’autre est immédiatement disponible, vous pouvez exprimer directement ce que vous avez à dire.
Poursuivons maintenant avec les exemples d’expression responsable du vécu en lien avec la mise en situation.
Exemple 1
Vous vivez de la colère et un sentiment d’injustice.
En étant sensible à la colère et au sentiment d’injustice qui vous habite, vous pouvez donc communiquer authentiquement et de façon responsable : «j’observe que tu me blâme d’arriver en retard et que tu généralises» Ça ma fâche et ça me blesse! C’est vrai que je suis en retard. J’ai vraiment fait de mon mieux! Je suis parti suffisamment tôt, mais j’étais coincé dans la circulation car il y avait un accident sur la route. Je n’ai pas pu communiquer avec toi. Je trouve ça difficile d’être accueilli de cette façon-là. Ça me met dans de moins bonnes dispositions pour notre repas de ce soir. En même temps, j’ai besoin de passer du temps de qualité avec toi. Comment me reçois-tu? Crois-tu pouvoir y arriver de ton côté?»
Exemple 2
Vous vivez un sentiment de culpabilité car vous savez que vous êtes souvent en retard.
Vous pourriez le lui exprimer : « Je vis un sentiment de culpabilité car je sais que je suis souvent en retard. J’ai des difficultés à mettre mes limites au travail. Je suis vraiment désolé pour ce retard. J’essaie d’apprendre à dire non lorsqu’on me demande un travail supplémentaire, mais je n’y arrive pas pour l’instant. Je vois que cela a un impact sur notre relation. D’autre part, je n’aime pas que tu me cries après. Ça me fait peur»
Exemple 3
Vous vivez de la honte car vous avez des difficultés d’organisation.
Cela vous demandera peut-être un grand dépassement pour exprimer la honte qui vous habite. Vous pourriez dire : «C’est vraiment difficile de me dévoiler à toi en ce moment. C’est vrai que je suis souvent en retard. J’ai des difficultés à bien m’organiser et je vis de la honte à ce sujet. Je ne te l’ai jamais dit avant et ça me prend tout mon courage pour te le dire aujourd’hui.»
Rappel: Les besoins psychiques fondamentaux.
Nos besoins psychiques fondamentaux ont besoin d’être satisfaits. Certaines personnes ne connaissent pas leurs besoins psychiques fondamentaux. D’autres les jugent d’être enfantins. D’autres personnes les connaissent mais ne les acceptent pas. Indépendamment de nos connaissances, jugements ou capacités d’acceptation liées à ce sujet, nous allons tenter de satisfaire nos besoins d’une manière ou d’une autre.
Lorsque nous sommes coupés de la souffrance associée à l’insatisfaction de nos besoins psychiques fondamentaux, nous n’avons pas de piste pour trouver comment nous occuper de ces besoins en relation. Par exemple, sentir la tristesse de l’isolement nous permet de nous occuper de notre besoin de lien. Il est possible que nous ayions à traverser les différentes étapes du changement créateur pour prendre conscience, accepter, nous responsabiliser et exprimer notre émotion de tristesse. Éventuellement, nous arriverons aussi à prendre conscience, à accepter et à nous responsabiliser de notre besoin de lien et nous pourrons nous en occuper en relation.
Pour en savoir plus au sujet des besoins affectifs, je vous invite à consulter l’article suivant:
Je m’exprime en Je et pourtant mon message ne passe pas…
Bien sûr, le succès de l’expression responsable de soi dépend du point de départ qui sied à l’intérieur de l’émetteur du message. Il arrive parfois que même si une personne s’exprime en Je, elle attribue tout de même, souvent inconsciemment, la responsabilité de ce qu’elle vit à l’autre. Dans ces cas-là, même si la personne s’exprime en Je, elle risque d’être culpabilisante et son message risque d’engendrer une réaction défensive.
L’expression responsable de soi n’est donc pas uniquement une question de choix de mots. Elle émerge surtout de l’alignement réel entre ce qui est dit en mots et ce qui est vécu et assumé intérieurement. C’est pourquoi la responsabilité de ce qui nous appartient est l’étape à apprivoiser avant de s’exprimer de façon cohérente et responsable. L’Étape suivante est l’observation de soi. Il en sera question dans le prochain article de cette série. À bientôt!
